Les Nuits de Cabiria

(titre original : Le notti di Cabiria) est un  film franco-italien réalisé par Federico Fellini et sorti en 1957.

Acteurs principaux Giulietta Masina, Amedeo Nazzari, Francois Périer (Oscar)

Synopsis: à Rome, Cabiria, une prostituée un peu simplette, échappe à la noyade après avoir été dépouillée par celui qu'elle croyait être son grand amour. Mais elle continue à porter un regard émerveillé sur la vie. Ainsi, après avoir passé une nuit enchanteresse chez le célèbre acteur Alberto Lazzari, elle fait la connaissance du gentil et timide Oscar. C'est de nouveau le grand amour jusqu'au soir où Oscar s'enfuit avec toutes ses économies. Au petit matin, après avoir voulu mourir, Cabiria reprend espoir au son de l'aubade que de jeunes musiciens donnent au nouveau jour

INTERPRETATION   SOPHIA ANALYTIQUE

Thème : le destin du féminin

Cabiria, enfant de prostituée, non désirée, se refuse à accepter sa blessure. Elle se refuse à accepter son destin féminin et s'y oppose en s'illusionnant sans cesse, en rêvant à une autre histoire. La répétition sans cesse de l'abandon est le signe de cette lutte contre la blessure : Un dimanche, elle se rend dans le sanctuaire de la vierge et fait le vœu de changer de vie, sa demande  illustre son souhait  profond ; Wanda, son amie, lui dit qu'elle se fait des illusions, c'est une femme qui a une parole de bon sens, qui accepte sa situation; La scène du théâtre, hypnotisée, Cabiria vit une belle histoire d'amour. Ellelle est précipitamment ramenée à la réalité, son rêve s'arrête brusquement. Elle aurait voulu que ça continue, c'est la trace claire d'une fuite devant la blessure ...

Quand Cabiria s'adresse à sa mère (il y a une photo de sa maman sur un mur de la maison), elle l'interpelle en lui disant que son propre destin est plus heureux que le sien. A travers cette intervention, les traces de sa dynamique d'opposition à sa mère sont visibles. Cette dynamique participe à sa difficulté d'être heureuse.

Cabiria s'attache à des hommes dans l'espoir de changer de vie : Giorgio, un bellâtre qui la vole et la noie ; Oscar un fonctionnaire qui finit par l'arnaquer ; et l'acteur qui l'utilise comme antidépresseur. A chaque fois, elle se fait des illusions, elle veut tellement changer d'histoire qu'elle en devient une proie idéale. En présence de l'acteur, Cabiria devient toute pétillante, c'est l'effet magique de l'impact œdipien. Cabiria n'a sans doute pas connu son père, étant issue du milieu de la prostitution. C'est le masculin qui a chaque fois lui donne l'illusion qu'elle change d'histoire. Les hommes  qu'elle rencontre sont des prédateurs qui profitent de sa faiblesse, ce sont des relations de prédateurs à victime.

Au début du film, Cabiria est dans un déni de cette blessure, à la fin du film, elle a accepté de la voir et elle se relève alors différemment. C'est la différence entre la première scène, la noyade, et la dernière scène, au bord du précipice. Après la noyade provoquée par Giorgio, c'est une furie qui sort de l'eau, elle envoie balader ceux qui l'ont  sauvée et elle reste seule.

 Au bord du précipice, volée par Oscar qu'elle croyait épouser, elle ne choisit  pas de mourir malgré sa douleur, elle fait le choix de la vie. Elle se met en lien avec une bande de musiciens, elle se laisse entourer et c'est à travers le regard cette fois d’une femme qu'elle trouve sa vitalité. Cette scène finale nous montre sa capacité à rebondir à quelque chose de tragique, un atout qui lui appartient et qu'elle va gérer mieux à présent. La fin du film peut augurer d'un passage positif, celui d'arrêter de rêver en ayant accepté sa blessure.